mardi, janvier 09, 2007

Tenir compte des votes blancs pour moderniser la démocratie

Ce texte a été proposé aux plus grands journaux français, mais la question ne leur a jamais paru d’importance. Serait-ce que les grands partis politiques, qui sont derrière ces journaux, redoutent une mesure qui contrecarrerait leur démagogie et éliminerait des acteurs trop bien en place? L’abstention croissante ou la présence de candidats extrémistes de tous bords, signes d’un rejet du fonctionnement actuel de la démocratie en France, est un sujet de second ordre pour ces médias. Pourtant, la reconnaissance du vote blanc, qui existe ailleurs sous différentes formes, permettrait de rassembler vers la démocratie de nombreux Français.

La reconnaissance et la comptabilisation des votes blancs existent différemment en Belgique et en Suède. Elle permet aux électeurs d’exprimer démocratiquement leur désaccord sur un choix référendaire ou leur refus des candidats qui sont proposés en évitant les votes de pure contestation en faveur de partis extrémistes, comme on le voit aujourd’hui en France.

Et si au second tour des Présidentielles les Français devaient choisir entre Le Pen et la candidate Ségolène Royale ?

Une telle éventualité, nullement irréaliste et qui mettrait à mal l’électorat de la Droite républicaine, est rarement envisagée dans les médias. Sans doute gène-t-elle les grands partis de Gauche et de Droite en soulignant le mal-être de la démocratie en France, pourtant diagnostiquée par de nombreux journalistes, et le détournement de son fonctionnement par les jeux politiciens. L’alternative « Le Pen ou Chirac » en 2002 n’a-t-elle pas pris les médias par surprise et placé les électeurs des Gauches, cette fois-là, dans l’inconfortable obligation de voter à l’encontre de leurs convictions ? Quelle peut être, alors, l’autorité morale et l’assise démocratique d’un président élu à contre cœur par une majorité de votants, seulement pour s’opposer à un autre candidat perçu comme pire ?

Dans l’hypothèse d’un choix entre Ségolène Royale ou Jean-Marie Le Pen en 2007, que feraient les électeurs des Droites ? Qui oserait prévoir ce que serait « le pire » pour eux ? Les plus honnêtes, ceux qui refuseraient une telle alternative, ne seraient-ils pas tentés de s’abstenir... ou de voter blanc ? Ils se trouveraient alors exclus du suffrage dit « universel » du fait que les bulletins blancs, comme les nuls, ne sont pas comptabilisés dans les suffrages exprimés. Le président ou la présidente risquerait donc, une nouvelle fois, d’être élu(e) comme « le moindre mal » et seulement par une minorité des électeurs.

Une progression inquiétante des abstentions et des votes Blancs

Journalistes et sociologues ne manquent pourtant pas de souligner cette inquiétante dégradation de la démocratie en France. Les Français perçoivent de plus en plus mal leurs hommes politiques et font de moins en moins confiance à l’État, tout en attendant de lui, peut-être faute de mieux, toujours plus d’assistance. Une « démagocratie » tend insidieusement à se substituer à la démocratie. Les politiques en sont conscients puisque Alain Juppé est allé jusqu’à dire, devant ses étudiants québécois : « En France comme au Canada, l’image des hommes politiques est désastreuse. C’est même l’un des métiers qui dans les sondages suscite le plus d’aversion, à égalité avec celui de prostituée (sic) » ! (Le Monde 2 N° 117, 13/05/06, p. 33). Faut-il s’étonner du désintérêt d’une partie croissante des Français pour une démocratie, voire de son rejet par une minorité, s’ils perçoivent celle-ci comme manipulée : 70% d’abstention et 4,9% de votes blancs ou nuls lors du référendum sur le quinquennat ! 2,43% de votes blancs ou nuls et 29,3% d’abstentions au premier tour des présidentielles de 2002 ! Aux législatives, les abstentions étaient déjà passées de 21,5% en 1986 à 32% en 1997 (sources : Assemblée nationale). Faut-il s’étonner par ailleurs de la montée consécutive des votes pour les partis extrémistes de droite ou de gauche et les petits partis « poil à gratter », votes essentiellement « réactionnaires » parce qu’en réaction contre la classe politique dominante ? Pour la prochaine élection présidentielle, les « Primaires » à la française, organisées par les deux principaux partis, si elles sont dans l’intérêt de ceux-ci, donnent le sentiment de verrouiller le choix des électeurs.

La prise en compte du vote Blanc pourtant discrètement examinée à l’Assemblée nationale.

Certains députés sont devenus conscients qu’ils ne pouvaient plus éluder systématiquement la demande insistante des électeurs de comptabiliser les votes blancs. En 1999, un sondage IFOP indiquait que 7% des Français avaient voté Blanc, 13% quelquefois et 16% rarement, soit par refus des candidats en présence, soit par hostilité aux politiques proposées (sources : Assemblée nationale). Au cours des trois dernières législatives, il y eut déjà douze propositions de loi dans ce sens, rarement relayées dans les médias. La dernière, déposée par le député UDF Jean-Pierre Abelin et débattue par la Commission des lois constitutionnelles le 22 janvier 2003, puis délibérée en séance publique le 30 janvier, visait (Article 1) à ce que les maires mettent à la disposition des électeurs autant de bulletins blancs que d’inscrits, (Article 2) à ce que les bulletins blancs « soient décomptés séparément et entrent en compte pour la détermination des suffrages exprimés ». Cela a été voté à l’Assemblée nationale, mais n’a pas été débattu au Sénat, de sorte que la loi, comme beaucoup d’autres en France », ne sera jamais appliquée. Le Parti Blanc (www.partiblanc.fr/) s’en est ému dans les médias, mais ceux-ci n’y firent guère écho.

Les modes d’emploi du vote Blanc

Le bulletin blanc signifie, dans le cas d’un référendum, que l’électeur ne juge pas pertinentes les questions posées ou est en désaccord avec les réponses possibles. Dans le cas d’une élection, c’est le rejet des candidats. Lors de la dernière élection présidentielle française du 21 avril 2002, si la reconnaissance et la comptabilisation des votes blancs avaient été inscrites dans la loi, il n’est pas impossible que ceux-ci eussent été plus nombreux que les votes en faveur de Le Pen ou de Chirac, les deux candidats du second tour. Et l’évolution de la France n’aurait-elle pas été différente ?

Quelles conséquences une loi officialisant la prise en compte des votes Blancs devrait-elle prévoir ?

La logique démocratique et le respect de l’expression populaire impliqueraient d’annuler le référendum ou d’en modifier les questions et, dans le cas d’élections, de reprendre le scrutin avec d’autres candidats. Le renouvellement de la classe politique s’en trouverait accélérée. C’est la raison pour laquelle les élus redoutent et repoussent autant qu’ils le peuvent la reconnaissance du vote Blanc. D’ailleurs, les propositions de loi déposées jusqu’à maintenant n’envisagent qu’une comptabilisation distincte des votes Blancs, sans en tirer les conséquences logiques. Le déplacement vers le bureau de vote de l’électeur, son acte de déposer un bulletin blanc dans l’urne reste donc assimilé à de l’abstention.

Le vote Blanc en Belgique et en Suède

Le vote Blanc est reconnu en Belgique et en Suède. Il est important de préciser comment il fonctionne dans ces deux pays. Si en France le vote n’est pas obligatoire, obligation qui serait incompatible avec la mentalité française, il l’est depuis le XIXe siècle en Belgique. La contrepartie de cette obligation a toujours été associée avec la prise en compte du vote Blanc. Mais l’article 156 du Code électoral sépare les bulletins blancs et nuls du décompte des votes . Ensuite l’article 157 considère comme nuls ou invalides (alinéa 4) : "Ceux qui ne contiennent l’expression d’aucun suffrage". Le résultat est enfin proclamé par un cheminement assez comparable à la France : http://www.elections.fgov.be/pdf/loiwet.pdf. Dans ce mode de scrutin, tout comme ce que prévoient les projets de lois déposés en France, le décompte ne peut influer sur le résultat de la consultation. A tel point que le « Vlaams Blok », l’extrême droite, est le deuxième parti de Flandre, parce qu’il draine, comme Le Pen en France, les votes contestataires. La montée de la misère et des affaires politico financières provoque, en Belgique aussi, une perte de confiance des électeurs. Par ailleurs, de nombreux commentateurs s’accordent pour constater que l’abstention et le vote Blanc ou nul correspondent à des scores comparables à ceux des partis traditionnels. En Belgique, l’obligation de voter n’est donc pas réellement compensée par une totale liberté d’expression de l’électeur, qui impliquerait la possibilité de refuser des candidats et, par voie de conséquence, de les rendre inéligibles, au moins pour quelques années.

En Suède, le problème se pose différemment. On ne parle plus de bulletins blancs, mais on comptabilise ensemble la totalité des bulletins invalides (ou annulés), ce qui inclut les bulletins blancs. Si le nombre de ceux-ci égale ou dépasse celui des autres bulletins, l’élection est annulée et il donc est procédé à un nouveau vote. (Art 25). De ce fait, un bulletin déchiré ou comportant des insultes a la même valeur d’expression qu’un bulletin blanc. Il n’y a pas de conséquences, non plus, pour les élus ayant participé à une élection où plus de 50% des électeurs ont voté blanc.

Engager un débat sur le vote Blanc en France... et ailleurs.

Cinq ans après le séisme qu’a représenté le choix entre Le Pen et Chirac le 21 avril 2002, la prochaine élection présidentielle devrait inciter les responsables politiques français à faire preuve de courage et d’honnêteté en donnant un signe fort d’assainissement de la démocratie en France. Mais quel parti inscrira dans son programme la comptabilisation des bulletins blancs comme suffrages exprimés ? Quand le choix par défaut pourra-t-il être remplacé par un véritable choix d’engagement, c’est-à-dire par un choix « d’action » et non de « réaction » ? Toutefois le malaise de la démocratie ne fait pas partie de « l’exception française », mais touche d’autres pays d’Europe et d’Amérique. En légalisant la reconnaissance et la comptabilisation du vote Blanc, réclamées dans plusieurs pays, la France, qui aime bien se montrer en exemple, pourrait prendre la tête d’un mouvement de modernisation de la démocratie qui finirait bien par se « mondialiser ».

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Patrick Plumet , Professeur honoraire de l’Université du Québec à Montréal.
Mehdi Guiraud, Président du Parti Blanc.

lundi, octobre 23, 2006

Le Référendum d'Initative Populaire : bientôt en France ?

Quel est le point commun entre la Californie, la Suisse ou l’Italie. A première vue pas grand chose mais si on se penche sur des questions constitutionnelles, on remarque que tous ont adopté le Référendum d’Initiative Populaire (RIP).

Qu’est-ce que le Référendum d’Initiative Populaire ? Il s’agit d’un référendum organisé à l’initiative d’une partie du corps électoral (les citoyens).

Ainsi, pour ces 3 pays, il est possible aux électeurs de poser un droit de veto sur certains textes adoptés par le parlement. Il est également possible en Suisse et en Californie de demander, toujours par voie référendaire, l’adoption de textes législatifs.

Même si la procédure de ce droit constitutionnel varie d’un pays à un autre, la proposition de référendum est toujours associée à une pétition devant recueillir un certain nombre de signatures (500 000 en Italie, 50 000 en Suisse ou encore 8% des personnes ayant voté lors de la dernière élection du gouverneur en Californie).

La Belgique propose également à ses concitoyens, des référendums consultatifs initiés par les électeurs. Même si ces référendums n’existent pas au niveau fédéral, ils sont applicables aux niveaux communal et provincial.

D’autres pays se sont engagés sur la voie de la participation citoyenne à la constitution des lois. Ainsi, les autrichiens et les portugais peuvent soumettre au parlement (toujours selon le principe de la pétition) une proposition de loi qui n’entraîne pas nécessairement l’organisation d’un référendum.

Et en France ?

Jacques Chirac en avait fait une promesse de campagne en 2002 mais depuis rien.

Alors pour 2007, un petit tour des propositions des partis en vu des élections présidentielles.
Seul l'UDF propose dans son projet de 6ème République,
l’introduction du référendum d’initiative populaire et souhaite constitutionnaliser « la représentation pluraliste des opinions et des territoires » dans les modes de scrutin.
Le parti socialiste est plus timoré et a inscrit dans son projet la création « d’une procédure nouvelle permettant à plusieurs milliers de citoyens de soumettre une loi au parlement ». Cette procédure d'une part n'est pas vraiment nouvelle (il est déja possible de faire signer des pétitions et de les transmettre à son député) et d'autre part ne peut être considérée comme de la démocratie participative, le parlement (donc les élus) ayant toujours le dernier mot.
En ce qui concerne le parti communiste, le programme n'est pas très clair. Il propose le RIP mais surtout il insiste sur la necessité pour
les assemblées élues de mettre à leur ordre du jour toute proposition émanant d’une partie des citoyens, rejoignant ainsi la proposition du P.S.

Quant à l’UMP, aucune réflexion sur ce sujet n’est disponible à ce jour.


Dans un pays, où les citoyens se détournent de plus en plus de la politique (en moyenne 30 à 40% d’abstention à chaque élection), où ils ont de plus en plus souvent l’impression de ne plus être écoutés (manifestation sur le CPE, fusion GDF/SUEZ), où la représentativité des sensibilités politiques des citoyens n’est pas représentée (vote à la majoritaire des députés, 80% des voix pour Jacques Chirac au second tour des élections présidentielles de 2002), il est temps de mettre un souffle nouveau à notre démocratie.

Le Référendum d’initiative populaire pourrait-être cet outil qui permettrait aux français de mieux s’intégrer et de mieux participer à la vie politique du pays.

Cependant quelques précautions sont à prévoir. Le référendum d’Initiative populaire, comme son nom l’indique doit être la voix du peuple. Et il serait facile d’en faire une récupération politique. Alors se pose la question de la personne qui sera à l’origine de la question posée. Le référendum d’initiative populaire doit-il être initié par une personne ou par un groupe de personnes plus ou moins impliquées politiquement. Par exemple, un chef de parti politique ou un responsable syndical peut-il lancer un RIP ? Le RIP ne sera t-il pas alors plus un outil de blocage qu’un outil de proposition et de progression. A mon sens, la mise en place d’un référendum ne peut se faire qu’à la condition de recueillir un très grand nombre de signatures afin d’éviter un afflux de « votations ». De plus, je pense que ne peuvent-être soumis au RIP que les lois qui concernent l’ensemble des citoyens français et non pas un petit groupe de personnes selon le vieil adage : l’intérêt général prévaut sur les intérêts particuliers. Le but du référendum est de poser de vraies questions sur l’intérêt des français et non de se rendre aux urnes tous les dimanches.

Alors, un tel outil de démocratie est-il applicable en France ? Et si oui, comment ce référendum pourrait-il s’instaurer ? Quelle procédure pourrait être mise en place ?

Les élections de 2007 seront l’occasion d’un renouveau démocratique et pourquoi pas de l’instauration du Référendum d’Initiative Populaire souvent promis, jamais instauré.


Sources :
http://www.senat.fr/lc/lc110/lc110.html



vendredi, octobre 13, 2006

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Par l'intermédiaire de ce blog, Démocratie active souhaite faire émerger des propositions concrètes en engageant une réflexion sur les thèmes de la citoyenneté et de l'engagement.

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